La montée en puissance des violences perpétrées par les rebelles du M23 et les terroristes des ADF met en péril la liberté de la presse au territoire de Lubero dans la province du Nord-Kivu. Plusieurs stations ont cessé d’émettre en raison de l’insécurité croissante, notamment dans les chefferies de Baswagha, Batangi, Bamate et le secteur de Bapere.

D’après le Réseau des Médias de Lubero (REMELU) et le Collectif des Médias de Manguredjipa (COMAM), les conditions de travail des journalistes se sont fortement dégradées. Non seulement les professionnels des médias sont menacés, mais les infrastructures et équipements radiophoniques ont également été pris pour cible.

Des stations pillées et contraintes au silence

Asaph Litimire, coordinateur du REMELU, déplore la multiplication des attaques contre les radios locales depuis juin 2024. « Plus de cinq stations ont été pillées à Kanyabayonga, Kayna et Kirumba. Dans les zones sous contrôle du M23, seules la RTNC et la chaîne TopCongo sont autorisées à être diffusées, ce qui restreint considérablement la liberté d’information », regrette-t-il.

Dans la région de Manguredjipa, où les ADF-MTM sont particulièrement actifs, la situation est encore plus préoccupante. Sur les cinq radios qui existaient, seules deux poursuivent encore leurs émissions, et seule la Radio du Peuple pour son Éducation (RPE/Njiapanda) reste véritablement fonctionnelle. Les autres ont été contraintes de fermer face aux menaces constantes qui pèsent sur le personnel et les infrastructures.

Zephanie Masumbuko, membre du COMAM, souligne l’inquiétude grandissante des journalistes et techniciens, qui craignent pour leur sécurité.

« De nombreux travailleurs des médias ont fui la zone, redoutant des représailles. Cette situation a plongé le secteur médiatique dans une crise sans précédent », explique-t-il.

Un paysage médiatique en pleine désintégration

Le président de l’Union Nationale de la Presse du Congo (UNPC) à Lubero, Jean Maliro, confirme l’ampleur du problème. « Avant l’occupation des rebelles, 17 radios fonctionnaient dans la région. Aujourd’hui, il n’en reste que six en activité, et celles qui persistent rencontrent d’énormes difficultés », précise-t-il.

Ces rares stations encore en service peinent à assurer leur mission d’information. Produire un journal local est devenu une tâche périlleuse, les journalistes craignant de diffuser des informations jugées sensibles par les groupes armés. Plusieurs d’entre eux ont opté pour l’autocensure, préférant éviter les sujets qui pourraient leur attirer des ennuis.

Un projet d’information avorté

Malgré ce climat hostile, certains journalistes ont continué à faire entendre les voix des déplacés à travers le projet « Sauti ya Wahami », initié en juin 2024. Ce programme permettait à des reporters en exil de couvrir les réalités des populations déplacées à Kirumba, Lubero-Centre et Butembo. Cependant, faute de financements, cette initiative a récemment pris fin, plongeant ses bénéficiaires dans une précarité accrue.

Face à cette situation préoccupante, Zephanie Masumbuko exhorte les autorités à rétablir l’ordre et à sécuriser les médias locaux. Il rappelle que les radios communautaires sont essentielles pour garantir un accès à l’information dans cette région en proie à l’instabilité. Pourtant, cette mission vitale est aujourd’hui sérieusement compromise par l’insécurité persistante.

Merveille META

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